Le 3 mai dernier, le sénateur Jean-Louis Masson a présenté une proposition de loi « tendant à faciliter l'identification des éditeurs de sites de communication en ligne et en particulier des « blogueurs » professionnels et non professionnels ».
Le but : en finir avec l’anonymat des blogueurs non professionnels.
Actuellement la loi pour la Confiance dans l’Economie Numérique (LCEN) distingue en effet entre les administrateurs de blogs professionnels et les non professionnels.
Les éditeurs d’un blog professionnel doivent mettre à disposition du public des éléments précis permettant de les identifier :
- leurs nom, prénoms, domicile et numéro de téléphone, s'il s'agit de personnes physiques ;
- leur dénomination ou leur raison sociale et leur siège social, leur numéro de téléphone, s'il s'agit de personnes morales ;
- le nom du directeur ou du codirecteur de la publication et, le cas échéant, celui du responsable de la rédaction ;
- enfin le nom, la dénomination ou la raison sociale et l'adresse et le numéro de téléphone de l'hébergeur du blog.
Quant aux administrateurs non professionnels, ils peuvent préserver leur anonymat sous réserve de communiquer ces éléments d’identification à l’hébergeur de leur blog.
Arguant de la multiplication des sites et des propos litigieux sur les blogs, le sénateur veut abolir cet anonymat et assujétir tous les éditeurs de blogs sans distinction aux mêmes obligations. Il en ajoute une supplémentaire à l'occasion: la précision de l'adresse mail du directeur de publication.
En outre, « par mesure de simplification », il prescrit d’assimiler l'éditeur de blog non professionnel au directeur de publication.
Invoquant l’exercice légitime du droit de réponse sur le net, Jean-Louis Masson se fait le pourfendeur des "dérives" du net, dont il ne cite aucun exemple, considérant au surplus que la limite entre professionnels et non professionnels du blog n’existe plus.
Pourtant la différence est simple : le blog non professionnel est un moyen d'exprimer ses turpitudes, sa vie, ses choix... Des épanchements certes publiés sur le net, qui constituent avant tout une échappatoire, un moyen de coucher toutes les vexations quotidiennes, son bien ou mal être, ses humeurs à la manière d’un journal intime ouvert à tous les vents.
Dans ce cas, le blog n’est pas une vitrine commerciale pour l’individu et encore moins son activité professionnelle principale même s’il en relate parfois les anecdotes ou actualités lorsque son auteur est soumis à un devoir de réserve notamment. Difficile dans ces circonstances de considérer que le blogueur non professionnel soit identique au blogueur professionnel et d’unifier leurs régimes.
La proposition sénatoriale remet clairement en cause un des buts d’internet: l’échange et la communication donnant la prime à toujours plus de traçabilité alors qu'elle n'est en rien justifiée.
Il est en effet possible de poursuivre et faire cesser les atteintes éventuelles à la réputation ou à l'honneur, en remontant au blogueur responsable via son adresse IP. Quel besoin a-t-on de connaître l'identité du blogueur amateur? Et pourquoi pas sa filiation, son origine ou encore ses opinions politiques? Il sera toujours temps pour le blogueur de créer une adresse et une identité factice.
Il est en effet possible de poursuivre et faire cesser les atteintes éventuelles à la réputation ou à l'honneur, en remontant au blogueur responsable via son adresse IP. Quel besoin a-t-on de connaître l'identité du blogueur amateur? Et pourquoi pas sa filiation, son origine ou encore ses opinions politiques? Il sera toujours temps pour le blogueur de créer une adresse et une identité factice.
L'anonymat ou encore l’usage de pseudonymes a toujours été un moyen d’écriture, de dénonciation, de libération ; le supprimer serait attenter à une des plus fondamentales libertés : celle de s’exprimer, de donner son avis, de critiquer.
On ne saurait que citer Raoul Vaneigem :"Il n'y a ni bon ni mauvais usage de la liberté d'expression, il n'en existe qu'un usage insuffisant." (Rien n'est sacré, tout peut se dire, 2003). Laissons donc prêcher Monsieur Jean-Louis Masson mais n'oublions pas de lui répondre. A vos blogs, Citoyenautes, blogs non professionnels de préférence.
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