Tous les chemins mènent à Rome... Entre deux bouchées, un dilemme capital assaille nos esprits de juristes : la "galette des rois" est-elle protégée, dans son nom, sa recette, sa forme ? : AOC? IGP? Label qualité?
Pour mieux répondre, un petit rappel historique :
Cette tradition chrétienne de célébration culinaire des rois-mages, quelques jours après Noël, serait une adaptation d’une antique coutume romaine qui avait lieu lors des Saturnales, grande fête en l’honneur du dieu Saturne qui durait sept jours et où « tout était permis ». Dans cet élan ludique, les romains utilisaient alors des fèves comme bulletin de vote pour élire le roi du festin !!! Une autre légende veut que la première fève ait émané de la bague perdue dans la pâte de la galette que confectionnait Peau d'Ane.
La tradition fait remonter l'usage connu de la fève (aliment) dans le gâteau au XIIIè siècle. La fève fit ensuite place à des pièces d'or puis à de petits objets de porcelaine.
La galette, ronde et plate, à l'origine faite de pâte plutôt lourde, s'allégea et devint par la suite multiple: feuilletée, demi-feuilletée, dite "de plomb", bâtarde, de Madrid, de Suisse, bretonne, normande, fondante, du Périgord, salée, brioche...
La galette, ronde et plate, à l'origine faite de pâte plutôt lourde, s'allégea et devint par la suite multiple: feuilletée, demi-feuilletée, dite "de plomb", bâtarde, de Madrid, de Suisse, bretonne, normande, fondante, du Périgord, salée, brioche...
L'affinage de la pâte feuilletée fit de la galette des rois un gâteau délicieusement léger, fleurant bon le beurre et le fondant. Ce fut la seconde épouse d'Henri IV, Marie de Médicis, qui, en quittant l'Italie, se fit remettre la recette d'une crème à la poudre d'amande, élaborée par le cuisinier de son plus proche soupirant, le Comte Frangipani. La recette plut à la Cour de France et reste la plus appréciée de nos jours.
En 1717, la galette fut à l'origine d'un différend fondamental (!) entre pâtissiers et boulangers : Qui a le droit de fabriquer des galettes? Le Parlement, au terme d'un hargneux débat juridique, interdit aux boulangers l'utilisation du beurre et des oeufs...Difficile de constituer une galette sans ces ingrédients : une première forme de label et d'exclusivité !
Déclarée ensuite "anticivique" sous la Révolution, elle franchit ce cap en proposant des fèves en forme de bonnet phrygien... pour reprendre à la première occasion sa forme originelle.
Mais alors : la galette des rois, aujourd'hui, est-elle libre de droits? En d'autres termes, peut-elle être fabriquée par n'importe qui, et selon n'importe quelle recette ?
Bien évidemment oui : aucune marque, aucune appellation d'origine, aucun label, aucun droits éphémère ne saurait protéger et monopoliser l'usage ancestral et diversifié de notre fameuse galette devenue presque apatride. Les recettes, les formes, les goûts sont multiples, bien que la classique pâte feuilletée fourrée à la frangipane trône en tête de liste, jamais menacée.
Nous avons toutefois trouvé une marque française "La Galette des Rois - Le Jeu", enregistrée dans la classe "jeux/jouets" par un malicieux...architecte (??!!), sans doute de manière abusive, cette tentative d'appropriation, même dans un domaine sans rapport avec la cuisine, ayant peu de chance de résister à une contestation éventuelle.
En revanche, la fève, dans ses nombreuses déclinaisons culturelles, ludiques, commerciales, sous licences (ex. : fèves Betty Boop), peut faire l'objet de droits privatifs (modèles déposés, marques 3D, droits d'auteur, etc.). De même, les produits constituant la galette (beurre, pâte d'amandes, oeufs, etc.) peuvent également faire l'objets de protections ou labellisations (AOC, IGP, labels qualitatifs, etc.)
Joyeuse Epiphanie à tous ceux qui la fêtent sans se soucier de ces questions annexes !
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire